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Pierre Jakob


26 mars 2016

Chaleureux, bienveillant, à l’écoute de ce qui anime chacun, tel se vivait l’accueil de Maurice Bertrand. Ce qui était trait de caractère mérite qu’on s’y arrête et qu’on le médite : en effet le penseur, l’homme de réflexion, qui jugeait des choses et des hommes sans les ménager, avait toutes les raisons de s’enfermer dans un sombre pessimisme.
Maurice Bertrand citait volontiers cette phrase de Tocqueville : «il faut une science politique nouvelle à un monde tout nouveau; mais c’est à quoi nous ne songeons guère». Comme très, très peu, il s’est appliqué à y songer.

En lisant et en relisant ses livres, le ton résolument neuf et original de la réflexion de Maurice Bertrand s’impose constamment : c’est une pensée qui médite à partir de réalités incontestables, qu’il appelle des « systèmes de sécurité », comme le Plan Marshall, la décolonisation, la construction européenne – réalités dont le fameux réalisme politique et la promotion de la techno-économie sont incapables de rendre compte, inscrits qu’ils sont dans le maintien d’un passé qu’ils veulent éternel.

Que la sévérité implacable du jugement n’ait jamais pesé sur la volonté d’engagement et le pari sur l’humanité, quelle leçon pleine de vie pour chacun qui veut la méditer ! quel rempart contre le bas cynisme ! et quel sens donné aussi à la chaleur et au plaisir que l’on se promettait toujours de l’amitié de Maurice Bertrand.

Pierre Jakob