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Les deux « réalismes »


| Maurice Bertrand

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Il est aujourd’hui essentiel d’être considéré comme « réaliste », si l’on souhaite être pris au sérieux. Ceci signifie qu’il faut penser qu’il est sans doute possible de faire des efforts pour éviter les guerres — les organisations mondiales et régionales témoignent en ce sens —, mais que si l’on veut être efficace, il faut toujours « préparer la guerre pour avoir la paix ».

Cette croyance, qui est celle de la très grande majorité des acteurs politiques et des politologues, est fondée sur une certaine vision de l’histoire (« il y a toujours eu des guerres, il y en aura donc toujours ») et sur une philosophie de la « nature humaine », avide, perverse et vaniteuse, qui contraindrait périodiquement au recours à la violence collective. Il en résulte que le monde changerait sans doute, grâce au progrès techno-économique, mais qu’il serait ridicule de croire à la possibilité d’un progrès moral.

C’est donc sur la définition même de « la réalité » que s’opposent deux conceptions du « réalisme » : celle qui domine aujourd’hui dans le monde, qui repose sur la croyance en la stabilité, et même en l’éternité, des structures mentales et institutionnelles de l’humanité et celle des rares esprits qui pensent que le dynamisme du « changement » en cours ne concerne pas seulement la techno-économie, mais dépend essentiellement de la transformation de la vision du monde qui se produit sous nos yeux. La thèse qui sera ici soutenue est que le « réalisme statique », qui est en fait « militariste », est une croyance obsolète et dangereuse, et que son abandon permettrait de mettre au point des stratégies beaucoup plus efficaces de construction de la paix. Seul le « réalisme dynamique », en tenant compte des profonds changements structurels qui affectent aujourd’hui l’humanité, peut permettre d’identifier les forces sociales en mouvement sur lesquelles il est possible d’agir. Il ne s’agit donc plus ici « d’utopie », mais de différence d’analyses.