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Jacques Vial


25 janvier 2016

Maurice Bertrand, est une personnalité connue et reconnue dans le monde de la diplomatie, de la culture, de la pensée, tant en France qu’à l’étranger; un homme discret et affable dont la vie et l’oeuvre sont en partie liées à notre commune: Banon. Pouvait-il en être autrement? Un grand-père boulanger et une tante secrétaire de mairie à Banon. Toutefois ses parents s’installent à Saint-Gilles dans le Gard où Maurice naît le 26 février 1922; après le décès de son père, Maurice et sa maman s’installent à Nîmes. Il fait de brillantes études au lycée de garçons de la ville collectionnant prix et récompenses; ses études il va les poursuivre à la faculté de droit de Montpellier puis à Lyon en 1939 à l’Ecole des Sciences politiques.

Nous sommes en 1943 et la vie de Maurice bascule. En effet , le gouvernement du maréchal Pétain instaure le STO (service du travail obligatoire) qui mobilise les jeunes français pour travailler en Allemagne. Refuser c’est déserter et encourir la peine de mort pour soi et les siens.
Maurice refuse et vient se cacher à Banon où il vit incognito au sein d’une famille amie de sa vieille tante, la famille Charles Vial, et ce pendant quelques mois.
Puis il est accompagné sur le plateau d’Albion où les organisations de Résistance (FFI et FTPF) ont mis en place plusieurs camps peuplés en grande partie de « réfractaires ». C ‘est donc bien à Banon que se concrétise l’opposition de Maurice au régime de Vichy et à la barbarie nazie. Ces camps sous l’autorité du poète René Char basé à Céreste, luttent pour la liberté et sont chargés de réceptionner les parachutages d’armes et de munitions provenant de Londres; Maurice participe à toutes ces activités qui ne sont pas sans risque et sur lesquelles plane toujours la hantise des « mouchards ». Plusieurs parachutages finiront mal avec mort d’hommes à la clé. C’est dans ces camps où l’on vit à la dure avec un ravitaillement incertain que l’intellectuel raffiné découvre une humanité diversifiée, complexe, inquiétante parfois mais souvent aussi chaleureuse. Il y fait l’expérience de la souffrance, de la violence, de la mort à donner ou à recevoir. Il ne l’oubliera pas.

Eté 1944, la France est libérée, Maurice rend ses armes et va terminer ses études à Paris. En Juin 1945 commence pour lui une carrière dans les grandes administrations de la 4é République: auditeur à la Cour des Comptes, puis Maître de Conférence à l’ENA ( 1946 à 1953), puis conseiller référendaire à la Cour des Comptes à nouveau.
En 1954 sa route croise celle de Pierre Mendès France dont il deviendra un conseiller technique. Cette rencontre marque une nouvelle étape dans son parcours politique et personnel.
Tous les étés, Maurice revient se ressourcer avec sa famille à Banon et saluer les amis des mauvais jours car s’ il était un brillant intellectuel, c’était aussi un homme de fidélité, d’amitié de coeur.

Sa carrière et son oeuvre écrite restent marquées par son expérience de la guerre Son obsession , c’est la recherche de la Paix.
En 1968 la France met Maurice Bertrand à la disposition de l’Organisations des Nations Unies (ONU) comme Conseiller puis Inspecteur et Président du Corps commun d’ Inspection, Groupe qui inspecte, surveille, audite et conseille les Nations Unies et ses grandes Organisations spécialisées. Il y oeuvre jusque dans les années 1990 à un très haut niveau de responsabilité et est reconnu dans le monde entier comme spécialiste et réformateur de l’ ONU. Après deux années passées comme professeur associé à l’Institut des Hautes Etudes Internationales de Genève il prend une retraite bien méritée. Le temps libre il le consacre à l’écriture dans sa maison du Haut Banon ou à Paris.

Diverses publications ont vu le jour, entre autres : «L’ONU» , «Les secrets de l’impôt», ou «Machiavel ou l’illusion réaliste». Ces quelques titres témoignent de son souci permanent de la justice sociale , de la sécurité des citoyens et toujours de la paix en Europe et dans le monde sans oublier sa grande curiosité intellectuelle. Maurice était et est resté un Européen convaincu car il connaissait les horreurs de la guerre.

C’est de son « pigeonnier » à Banon qu’il règle ses comptes dans ce qui sera son dernier ouvrage avec Machiavel, écrivain du XVé siècle, conseiller de la puissante République de Florence et théoricien du cynisme en politique: «tout est permis , pourvu que cela réussisse» ce que Maurice, bien sûr ne pouvait accepter!
L’été à Banon il a aussi plaisir avec Doris son épouse à retrouver dans leur maison des remparts du Vieux Village toujours ouverte et accueillante à la famille, enfants, petits enfants, arrière-petits enfants et les amis qui garderont en mémoire ces réunions fraternelles et animées autour d’un bon verre de vin; il faisait bon y rêver le monde idéal ou tenter de refaire l’existant!
C’est pourquoi le 10 janvier 2016 autour de Doris quelques amis étaient rassemblés et en parlant de Lui nous avons eu l’impression de prolonger encore sa présence. Maurice gardera une place à part dans la mémoire et le coeur de celles et ceux qui ont eu la chance de le croiser sur leur chemin.

Jacques Vial